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L’entreprise n’est pas une démocratie

18 Fév L’entreprise n’est pas une démocratie

L’entreprise n’est pas (toujours) une démocratie.

Il est des concepts évidents qu’il est pourtant utile et nécessaire de remettre sur le métier de temps à autres.

La démocratie est de ceux là.

La formule canonique d’Abraham Lincoln : «le gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple» nous est familière, et le sens étymologique est sans équivoque : «souveraineté du peuple». Aux origines du sens premier de «régime», ni les oligarchies, ni les monarchies ne sont assimilables aux démocraties.

Nos sociétés policées nous ont appris, à force de compromis et de progrès, à élargir et parfois amender le contenu et les formes possibles que peuvent revêtir les démocraties.

Le penseur politique Alexis de Tocqueville (1805-1859) en a enrichi le sens commun en y intégrant l’importance du partage de valeurs culturelles telles l’égalité et la liberté. La vision actuelle la plus communément partagée du terme démocratie est un héritage direct, entre autres courants, de cette pensée.

Nourris de ce système, et surtout de ses valeurs, ce mode de pensée est heureusement présent dans la majorité de nos réflexions et de nos prises de positions.

Dans quelle mesure, en tant que dirigeants, en voulant activer l’implication et la motivation des collaborateurs, ne sommes nous pas tentés d’installer au sein de nos entreprises un fonctionnement aux allures démocratiques, alors que par essence nos entreprises ne pourront en revêtir au maximum que la forme?

Les quelques points suivants vont rendre le propos plus concret :

  • Le dirigeant délègue des tâches mais rarement des responsabilités finales.
  • La mission de l’entreprise est généralement fixée par les mandataires/investisseurs.
  • La vision de l’entreprise est généralement fixée par le(s) dirigeant(s) porteur(s) du projet.
  • La stratégie est généralement validée uniquement par les actionnaires et les dirigeants.
  • Fixer les objectifs et évaluer les performances incombe au(x) dirigeant(s).

Cette liste, réaliste et factuelle, ne peut à aucun point de vue être ramenée à un fonctionnement démocratique.

D’un point de vue fonctionnel, un premier constat me vient à l’esprit. Celui des risques que le dirigeant prend en ouvrant la discussion sur quelques aspects de son projet.

Le risque de créer une opposition (au sens politique) à ses idées et d’être mis inutilement sous la pression de générateurs d’idées qui ne seront pas tenus de les organiser, les assumer et les financer.

Le risque de générer une démotivation de par la saveur amère du sentiment de n’être pas entendu dés lors que les décisions ne sont pas systématiquement en lien avec l’attitude démocratique d’ouverture et de dialogue du dirigeant.

Les risques d’échecs liés à la confusion, à l’incompréhension, au manque d’adhésion, au manque de clarté réel ou ressenti de l’objet de la mission de l’entreprise sont très généralement sous-estimés par les dirigeants.

Certains experts, tels P. Drucker n’hésitent pas à placer ce facteur au premier rang des causes d’échec des projets entrepreneuriaux.

D’un point de vue relationnel, il n’est pas certain que les coûts de la démotivation, de la moindre productivité et des distorsions dans la communication ne soient pas supérieurs aux bénéfices d’une attitude patronale démocratique.

Que faire alors?

L’alternative ne se trouve naturellement pas du côté de la tyrannie ou de la dictature. Tout comme les comparaisons avec le Kibboutz (où il n’y a pas de possession propre) et le Kolkhoze (où la possession est permise et les parts de revenus et de profits sont distribuées en fonction des heures prestées), deux modèles initialement basés sur le travail et les revenus de la terre, ne sont pas de mises.

L’entreprise, tout comme nos sociétés (au sens de communautés) sont participatives mais pas automatiquement démocratiques, là est probablement une source de confusion importante dans nos attitudes et nos relations.

La clé se trouve, à mon sens, dans une notion toute aussi générique et répandue que la démocratie: la collaboration.

Collaborer désigne l’effort conjoint de plusieurs ressources dans le but de l’atteinte d’un objectif commun.

L’objectif sera atteint en commun par la collaboration.

Il sera fixé en commun uniquement dans un contexte démocratique.

Cela fait bien plus qu’une nuance.

Une de nos premières missions de dirigeant consiste à fixer et formaliser nos objectifs, notre mission et notre vision.

Sans cela, nous ne pourrons mobiliser aucune ressource de manière efficace et productive.

Un des premiers rôles que nous devons endosser est celui de garant de l’atteinte des objectifs.

Une des vertus du modèle collaboratif est qu’il n’est en rien tenu d’être collectiviste ou égalitaire en quoi que ce soit.

Notre responsabilité de dirigeant dans la collaboration est avant tout que les rôles, responsabilités, mandats et surtout les contributions de chacun (dirigeant y compris) soient conformes à ce qu’elles doivent être.

Souvenons nous avant tout que la solidité d’une chaîne n’est jamais que la solidité de son maillon le plus faible et que diriger n’est pas un privilège, mais une responsabilité.

Cela nous donne, en guise de conclusion, une belle analogie avec la navigation:

Chacun à son poste et cap sur la mission!

Patrick Colot

Praticien Senior en Management

Administrateur tec-ma

www.tec-ma.be